Il ne reste que quelques jours pour voir la très belle installation de Stéphane Thidet au Collège des Bernardins… A ne surtout pas manquer !
Dans la pénombre, deux arbres suspendus tournent lentement au-dessus de l’eau, l’extrémité de leurs branches traçant à la surface des dessins éphémères dont le reflet irisé éclaire les murs de pierre de l’ancienne sacristie.
Bâti au milieu du xiiie siècle pour abriter la formation des moines cisterciens, le Collège des Bernardins accueille aujourd’hui de nombreuses manifestation culturelles.
A l’invitation de Gaël Charbau, chargé de la programmation des arts plastiques et commissaire de l’exposition, l’artiste Stéphane Thidet a élaboré le projet « Solitaire » en métamorphosant l’aspect de l’ancienne sacristie. Partant des images que lui avait inspirées sa première visite dans l’espace d’exposition – « un bord de lac ou d’étang la nuit éclairé à la lumière des phares d’une voiture ou d’une lampe de poche, la sensation de descendre dans un puits ou un lac de cratère » –, il a recouvert le sol d’eau, le transformant en une zone à la fois inaccessible et insaisissable dont la surface devient un miroir flottant et une étendue « dessinable ». Dans le prolongement de ses recherches antérieures, cherchant à confronter sculpture et eau, l’artiste a imaginé de faire tourner doucement deux troncs d’arbres récupérés sur le littoral méditerranéen, à la manière de danseurs dont les gestes se répondraient sans jamais se rencontrer, projetant leur image sur la surface et inscrivant à fleur d’eau des signes à peine perceptibles dont les murs se font l’écho. La scène évoque le passage du temps, celui qui a laissé sa trace sur ces arbres décharnés et violentés, mais aussi un temps arrimé au présent, dans ce mouvement cyclique répété mais toujours différent, car renouvelé à chaque instant.
Pour Stéphane Thidet, les objets inanimés sont en état de coma. Une légère impulsion, un décalage, peuvent suffire à leur redonner vie. L’eau joue dans son travail un rôle de premier plan, potentiellement apaisante ou au contraire violente, jamais totalement contrôlable. Dans « Le Refuge » (2007), il mettait en œuvre une cabane de montagne dont la porte et les fenêtres ouvertes sur un intérieur éclairé et sobrement meublé se présentaient comme une promesse d’hospitalité, une invitation à entrer, à l’image de l’abri réconfortant pour le randonneur fatigué ou le promeneur égaré ; mais une pluie torrentielle s’abattant à l’intérieur de façon continue depuis le plafond empêchait toute possibilité de s’y tenir.
Artiste aux pratiques diverses, explorant toutes sortes de médias et de matériaux, Stéphane Thidet s’ouvre avec chacun de ses projets à de nouvelles expériences. Détournant les situations et les formes ou inversant l’ordre des choses, il s’attache à repousser les repères traditionnels de l’art pour mieux stimuler notre imaginaire, comme avec « La Meute » (2009), où il introduisait un groupe de loups dans le parc du château des ducs de Bretagne au cœur de Nantes, confrontant ainsi les habitants au « sauvage » dans un environnement habituellement très « civilisé ».
Un exposition rétrospective de son travail est programmée à l’automne prochain à l’abbaye de Maubuisson, dans le Val d’Oise.
Ancienne Sacristie du Collège des Bernardins,
20 rue de Poissy – 75005 Paris
Accès libre du lundi au samedi de 10h à 18h, le dimanche et les jours fériés de 14h à 18h
Jusqu’au 10 juillet 2016
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