Comme chaque année, le retour du printemps s’accompagne à Paris d’une floraison d’événements associés au dessin. Cette semaine, pas moins de trois salons sont consacrés à ce médium dans la capitale, offrant aux amateurs une large palette de styles, de techniques et de supports différents.

Drawing Now 2024 :

Pour sa 17^e édition, la Drawing Now Art Fair réunit au Carreau du Temple 73 galeries de 15 pays différents – dont plus d’un quart de nouveaux exposants – montrant les œuvres de quelque 300 artistes. Divisée en trois secteurs, la foire rassemble dans le secteur général, situé au rez-de-chaussée, un peu plus des deux tiers des exposants, les autres se répartissant entre les secteurs Insight et Process, installés au sous-sol. Afin de donner plus lisibilité aux visiteurs, les galeries du secteur général  sont tenues de consacrer au moins 30% de leur stand à un focus sur un artiste. Le secteur Insight, regroupant une dizaine de galeries, propose un parcours plus intime distribué en solo ou duo shows consacrés à des artistes émergents ou moins connus, tandis que le secteur Process, constitué d’une dizaine de galeries également, rassemble des artistes associant le dessin avec d’autres médiums ou disciplines.

Sur le stand de la galerie LMNO,  on découvre en primeur les derniers dessins relatant l’odyssée des géants du collectif petticoat government qui représentera cette année la Belgique à la biennale de Venise.

La galerie Lara Sedbon présente une série de portraits tracés par Fabien Mérelle sur des fragments de tuffeau, pierre de la région de Touraine dans laquelle l’artiste vit avec sa famille, qu’il a représentée ici comme les fondements constitutifs de son univers familier.

En marge de son focus sur l’artiste américain Riley Holloway, la galerie Backslash expose une séduisante série de polaroids détournés par France Bizot.

Nouvelle venue dans la foire, la galerie Nathalie Obadia consacre un focus à Roger-Edgar Gillet – passé, à contre-courant des tendances, de l’abstraction à la figuration au milieu des années 1950 – et propose plusieurs dessins sur plâtre de l’énigmatique Sophie Kuijken.

Avec sa série Blue Rave réalisée au stylo à bille, Robin Wen accroche le regard à la galerie C par ses portraits de petit format aux délicates variations.

Le prix Drawing Now Art Fair 2024, doté de 15.000 € et d’une promesse d’exposition au Drawing Lab l’an prochain, a été décerné mercredi à Tatiana Wolska pour ses grands dessins colorés aux formes organiques présentés à la galerie Irène Laub. Née en Pologne en 1977, l’artiste qui vit et travaille aujourd’hui à Bruxelles a déjà un beau parcours derrière elle : diplômée de la Villa Arson, elle a gagné le grand prix du salon de Montrouge en 2014, bénéficié d’une exposition personnelle au palais de Tokyo la même année et été exposée depuis dans plusieurs grandes institutions. Utilisant essentiellement des matériaux de récupération dans son travail, elle élabore de grandes sculptures aux formes hybrides à partir de bouteilles en plastique de couleur découpées et réassemblées au fer à souder, fabrique des sculptures en bois avec des planches de palettes recyclées, et construit des architectures fragiles composées de débris de bois et de carton. Au palais de Tokyo, elle avait conçu une cascade constituée de milliers de clous. La galerie Irène Laub exposait l’an dernier sur ce même stand ses broderies réalisées sur des feuilles d’essuie-tout, et l’on a pu voir cet hiver à la Centrale for contemporary art à Bruxelles plusieurs exemples pleins d’humour de sa pratique polymorphe dans l’exposition « L’art de rien ».

La sélection pour le prix Drawing Now 2024 comptait également quatre autres artistes femmes : Caroline Corbasson, avec ses ciels noirs ponctués d’étoiles présentés à la galerie Dilecta, Stéphanie Mansy et ses réflexions sur le rapport à la matière et au support à la Galerie F, Catherine Meurisse et ses illustrations pleines de drôlerie à la Galerie Barbier, Marine Pagès et ses déclinaisons sur le memento mori chez Bernard Jordan.

À voir encore dans le secteur général, les collages chargés d’énergie et de combativité de l’Espagnole Susanna Inglada, exposés par le Néerlandais Maurits van de Laar, les compositions mystérieuses de Gideon Kiefer à la galerie Martin Kudlek, les non moins énigmatiques images de Gabriella Giandelli, aux couleurs chatoyantes, à la galerie Martel, les broderies-paysages aux contours dévorés de Cathryn Boch à la galerie Papillon, ou les papiers ponctués du motif-signature de Claude Viallat à la galerie Catherine Issert.

Dans le secteur Insight, il ne faut pas manquer la série de pastels de la jeune Camille Brès à la galerie Ariane C-Y, les cartographies troublantes de Greta Schödl remises en lumière par la Labs Gallery, ou les dessins imprégnés d’humour, réalisés à l’encre sur papier verni, de Priscilla Beccari à la galerie Younique. La galerie Parliament nous plonge dans l’univers particulier d’Helmut Stallaerts, qui montre ici des œuvres réalisées sur de l’écorce de bouleau ou de la résine.

Dans le secteur Process, la galerie 22,48m2 abrite dans un stand presque aussi petit que les œuvres qu’elle présente les miniatures de la série Gynécée de la jeune polonaise Paola Ciarska, peintes à la gouache sur du carton découpé en carrés ou en hexagones tenant dans la paume de la main, qui représentent dans un architecture en perspective une superposition de petites scènes animées de personnages exclusivement féminins s’adonnant à diverses activités ludiques ou relaxantes dans un univers pop et coloré dont les hommes semblent avoir complètement disparu. La galerie Quand les fleurs nous sauvent expose une série d’œuvres délicates de Françoise Vanneraud, et Binome présente en mades dessins du photographe Laurent Millet.

L’exposition « Animation : mécanique de l’esprit », conçue par Joana P.R. Neves, directrice artistique de Drawing Now, en partenariat avec le frac Picardie, élargit le cadre de la foire en exposant des œuvres recourant au dessin en mouvement. Encore peu présent dans la foire, celui-ci pourrait tracer des perspectives d’avenir pour le médium.

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Quelques images supplémentaires :

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Drawing Now Art Fair, Carreau du Temple, 4 rue Eugène Spuller, 75003 Paris, jusqu’au 24 mars – https://www.drawingnowartfair.com/le-salon/

DDessin Paris :

Autre manifestation dédiée au dessin contemporain, le salon DDessin Paris, installé dans l’hôtel particulier Domus Maubourg près des Invalides, propose dans un format resserré de neuf galeries une sélection de 28 artistes dans laquelle on retiendra notamment les œuvres des deux protagonistes présentés par la galerie Mathilde Hatzenberger : Paul Maciejowski et ses scènes hallucinées sur la guerre en Ukraine, visions infernales qui contrastent violemment avec les images d’Eden proposées sur le même mur par Alexis Gallissaires. De celui-ci, la représentation d’Adam et Ève en simples mortels contemporains se détachant en grisaille sur fond de papier peint végétal de couleur verte, est une belle interprétation du thème de la Chute largement traité à travers l’histoire de l’art.

La galerie Gaia présente un solo show de l’artiste 1011, avec une série intitulée Vanité évoquant l’effet du réchauffement climatique sur les végétaux, et une autre, This is Not Consent, faisant référence au jugement rendu après un viol perpétré en Irlande en 2018.

À l’étage sont exposés par la galerie Robet-Dantec des paysages marins réalisés à l’encre mêlée de sel par Yann Bagot.

La galerie Olivier Waltman présente plusieurs artistes utilisant le crayon graphite sur papier, ainsi que les dessins au feutre – sur une sphère en bois et sur un œuf d’autruche – de Claire Fanjul.

DDessin Paris, Domus Maubourg, 29, boulevard de la Tour-Maubourg, 75007 Paris, jusqu’au 24 mars – https://ddessinparis.com

Salon du Dessin :

Last but not least, le classique Salon du Dessin rassemble au palais Brongniart pour sa 32^e édition les meilleurs représentants du dessin ancien et moderne. 39 galeries – dont 17 venues de l’étranger – y sont réunies, auxquelles s’ajoutent deux invités d’honneur : la fondation Dubuffet, qui présente une cinquantaine d’œuvres de l’artiste réalisées entre 1935 et 1985, et la fondation allemande Tavolozza créée par l’ancienne négociante en art et collectionneuse Katrin Bellinger, qui expose un remarquable ensemble de portraits d’artistes au travail. Le salon accueille également les œuvres des trois candidats nommés pour le prix de dessin de la fondation d’art contemporain Daniel et Florence Guerlain, qui a été attribué ce jeudi à l’artiste israélien autodidacte Amir Nave.

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Salon du Dessin, palais Brongniart, place de la Bourse, 75002 Paris, jusqu’au 25 mars – https://www.salondudessin.com/fr/accueil/

Photo de titre : Fabien Mérelle, Fragment #23, 2022, by Lara Sedbon © Isabelle Henricot