En marge de l’actualité politique et sociale agitée de ce mois de mars, Paris s’affiche aussi cette semaine comme la capitale mondiale du dessin, avec les deux plus importants salons consacrés à ce médium – le Salon du Dessin, qui rassemble au Palais Brongniart la fine fleur du dessin ancien et moderne, et Drawing Now Art Fair, au Carreau du Temple, où sont réunis les meilleurs représentants du dessin contemporain. S’ajoutent à cela plusieurs ventes de prestige dédiées à cette spécialité chez Christie’s, Sotheby’s et Ader, ainsi que des expositions dans plusieurs musées, tout ce qu’il faut pour attirer amateurs et collectionneurs du monde entier.
Le dessin a le vent en poupe ces dernières années sur le marché de l’art. Son prix beaucoup plus abordable que celui de la peinture attire un nombre croissant d’amateurs. Ce médium permet en outre d’approcher au plus près le processus de création de l’artiste dans sa spontanéité, ce qui contribue aussi à son attractivité. Par sa très grande variété de styles, de supports, de formats, le dessin contemporain offre de quoi satisfaire toutes les sensibilités et rencontrer tous les publics. Christine Phal et sa fille Carine Tissot, respectivement fondatrice/présidente et directrice générale de Drawing Now Art Fair, l’ont compris depuis longtemps.
Pour sa 16e édition, le salon rassemble 73 galeries, pour un tiers étrangères, exposant ensemble près de 300 artistes et plus de 2000 œuvres.
Comme lors des éditions précédentes, la foire est distribuée en trois secteurs : au rez-de-chaussée, le secteur général regroupe sous la verrière une cinquantaine de galeries confirmées, tenues de réserver au moins 30% de la surface de leur stand à un seul artiste, ce qui évite une trop grande dispersion et permet une meilleure immersion dans l’œuvre ; au niveau inférieur sont installés les secteurs Insight, dédié aux galeries ou artistes émergents ou moins connus, et Process, consacré à des projets plus spécifiques associés au dessin.
Au niveau – 1 se tient cette année une exposition curatée par la directrice artistique de la foire, Joana P. R. Neves, réunissant des œuvres d’artistes femmes prêtées par le Frac Normandie, ainsi que celles d’artistes invitées (Le prisme du féminin : machines, ovocytes, fils, potions).
Performances et débats complètent le programme.
Parmi les artistes à découvrir au fil des stands, on trouve aussi bien des pionniers comme Vera Molnár, 99 ans aujourd’hui, représentée par la galerie Berthet-Aittouarès avec un ensemble d’œuvres datant des années 1970 à 2022 (le grand collage Carré coupé en 4 a été réalisé l’an dernier avec l’aide de son assistant), que des artistes très jeunes comme Katarzyna Wiesiolek (1990) en focus chez Eric Dupont ou Cyrielle Gulacsy (1994) chez Anne-Sarah Bénichou. Dans le cadre du Prix Drawing Now 2023, six candidats ont été sélectionnés parmi les artistes présentés par les galeries. Le prix a été attribué lors du vernissage à Suzanne Husky (galerie Alain Gutharc) pour son travail sur les questions environnementales et la protection de la nature. Elle bénéficiera en 2024 d’une exposition au Drawing Lab, accompagnée d’un catalogue.
Suzanne Husky, lauréate du prix Drawing Now 2023
La galerie Alain Gutharc qui la représente expose également les jolies aquarelles d’Edi Dubien. Chez Lelong & Co, celles de Barthélémy Toguo voisinent avec les gouaches de Marc Desgrandchamps et les arbres dénudés de David Nash. Le Londonien Patrick Heide expose de grandes aquarelles abstraites de Barbara Nicholls. Chez Backslash, Stella Sujin revisite l’univers des contes. À la Galerie Dys, les œuvres mystérieuses de l’artiste basque Maldo Nollimerg font écho à l’univers poétique de la chilienne Sandra Vásquez de la Horra, dont on retrouve les silhouettes sur papier plié enduit de cire à la galerie Bendana-Pinel.
Bernard Chauveau expose dans sa galerie 8+4 de grandes encres et aquarelles d’Anne et Patrick Poirier illustrant les écrits de Dante, ainsi que le travail des sœurs Chevalme sur le post-colonialisme et l’identité. Spécialisée dans le dessin d’illustration, la galerie Martel présente un bel ensemble de Lorenzo Mattotti et d’étranges vues d’intérieur habitées d’animaux de Gabriella Giandelli. La galerie Catherine Issert propose un focus sur les paysages colorés de Marine Wallon, et montre des œuvres de Martin Belou et de Jean-Charles Blais. À la galerie Schönfeld on découvre les beaux portraits à l’aquarelle de Tina Berning à côté des dessins d’Albert Pepermans. Maurits van de Laar expose les collages monumentaux et mouvementés de Susanna Inglada. Chez Polaris, on s’amuse des scènes chaotiques dépeintes par Marcos Carrasquer.
Irène Laub met l’accent sur les compositions subtiles de Stijn Cole, qu’elle présente à côté des cartons découpés de Fernanda Fragateiro et des broderies sur essuie-tout de Tatiana Wolska. Focus sur Keita Mori et ses compositions géométriques en fil de soie et de coton chez Catherine Putman. Le fil encore, mêlé au plastique et à la gouache pour les dessins de Cathryn Boch à la galerie Papillon, qui met à l’honneur la création polymorphe de Jean-Claude Ruggirello. La galerie Semiose présente un très beau Fumeur de Françoise Pétrovitch. Pour sa première apparition à Drawing Now, la galerie Templon expose des œuvres de Daniel Dezeuze, membre fondateur du groupe Supports/Surfaces, dont un ensemble de dessins poétiques inspirés du jardin de Monet. À la galerie Maubert, on retrouve Nicolas Daubanes, prix Drawing Now 2021, et ses dessins à la limaille de fer, ainsi qu’un bel ensemble d’œuvres de Joachim Bandau. Chez Aline Vidal, focus sur Stéphane Thidet et ses étonnants dessins de fleurs écrasées au marteau ou encore ses dessins brûlés au fer à souder, à côté des compositions fantasmagoriques de la jeune iranienne Helika Hedayat dont on peut voir aussi un dessin évolutif à l’entresol dans le cadre de l’exposition Le prisme du féminin.
Dans le secteur Insight, au sous-sol, la galerie Ariane C-Y présente une exposition monographique du Britannique William Wright, avec un large ensemble de croquis issus de la pratique quotidienne de l’artiste britannique, accompagnés de quelques dessins plus élaborés. La Vazieux Gallery consacre elle aussi tout son stand à l’artiste Sarah Jérôme et ses belles compositions à l’huile sur papier calque. Dans le secteur Process, la galerie Binome expose des dessins réalisés par la photographe Corinne Mercadier, ainsi que des photographies d’architecture dans lesquelles l’artiste a intégré des peintures sur verre représentant des nuages, de la fumée ou des formes lumineuses. La galerie Analix Forever présente une spectaculaire installation composée de toile, de carton, papier de soie, crayon, sable, etc. de la Hongroise Eva Magyarosi, qui expose également une vidéo sur le même stand.
Quelques images supplémentaires :
Drawing Now Art Fair
Carreau du Temple
4, rue Eugène Spuller
75003 Paris
Du 23 au 26 mars, de 11h à 20h, le dimanche de 11h à 19h
Image de titre : Focus Oscar Holweck à la galerie Martin Kudlek © Isabelle Henricot
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